dimanche 24 mars 2013

Ô toi réseau social dis moi qui est le plus beau

Un dirigeant que je connais depuis des années m'appela un jour dans l'urgence, avec une question fondamentale à ses yeux: comment bien prendre la vague des réseaux sociaux ?
Il devait croire que nous consultants on a réponse à tout sur tout. Bref, je ne voulais pas le décevoir et je gagnai du temps en lui proposant de m'inviter à déjeuner dans un restaurant branché ( je ne peux pas faire de publicité sur ce blog) genre drugstore en haut de la plus belle avenue du monde.
Heureusement dans mon réseau j'ai quelques spécialistes du sujet et j'optai pour une formation accélérée sur les réseaux sociaux. Quelques jours plus tard, après bien des lectures, des recherches et des coups de téléphone, je me sentais préparé pour aider mon hôte à devenir le beau surfeur du 'social networking' qu'il rêvait d'être.



Le jour J, assis à ma table habituelle (et oui chez nous on est fidèle aux bonnes adresses parisiennes), sirotant un bonne tasse de thé, je vis débarquer un homme stressé, prêt à me bombarder de questions toutes aussi décousues les unes que les autres. Il fallait prendre le problème à la base et en élaguer les branches parasites.
Ma première question fut: quel est ton business et qui sont tes clients ?
La réponse s'avéra assez simple voire décevante:  il avait monté un cabinet de conseil en stratégie, organisation et management, un métier où ne règne pas la plus grande innovation et dont les petits acteurs, ceux qui ne sont ni globaux, ni américains, gèrent leur affaire par le carnet d'adresses essentiellement.
Ce n'est pas grave, pensai je, on n'a pas tous les jours la chance de rencontrer un inventeur et ce n'est visiblement pas pour aujourd'hui. Ses clients étaient les grands donneurs d'ordres connus sur la place de Paris, de belles et grandes entreprises du CAC 40.
Alors quelle était sa préoccupation ?
Un besoin de notoriété ? C'est légitime dans ce métier quand on veut se détacher des grands cabinets par une identité particulière mais qu'on n'a pas une offre différenciante.
Attirer des talents ? Le conseil est un business fait par des humains avec d'autres humains et le casting est très important. Appauvrir la qualité de ses consultants en recrutant des seconds couteaux ou des diesels de la pensée est un facteur de risque important dans ce métier, surtout quand l'effectif n'est pas suffisamment important pour masquer la triste réalité.
Atteindre d'autres clients ? C'est l'hypothèse la plus probable et la plus mise en avant généralement dans les articles de journaux au sujet de l'usage professionnel des réseaux sociaux.

Quand vous avez en face de vous un dirigeant du conseil, quelqu'un qui est habitué à conceptualiser puissamment, à placer dans l'abstraction les situations les plus réelles, il vaut mieux orienter d'office les réponses dès la question, ce afin de limiter le champ des possibles. Avec cette phrase déjà bien compliquée j'illustre l'état de mon interlocuteur du moment, capable qu'il était de me répondre avec plus de points virgule que de verbes et plus d'idées que de vrais sujets, juste parce que son cerveau fonctionne de cette manière.

La réponse était: la notoriété. Et oui, je n'aurai personnellement pas parié dessus mais c'était bien là sa préoccupation. Il avait lu un peu partout, entendu dans son entourage beaucoup d'avis, sur les réseaux sociaux et la vague qu'il ne fallait surtout pas rater. Et celle là il ne l'avait pas vue venir, pour lui les réseaux sociaux c'était comme un forum où les adolescents publiaient leurs états d'âme, où les célibataires cherchaient à rompre la solitude, où les cadres postaient leur CV. Rien de plus.

Il avait pourtant tout bien fait jusqu'ici: un cabinet qui portait son nom, des collaborateurs qui l'adoraient, un site Internet fabriqué par une agence de communication spécialisée, une attachée de presse d'origine aristocratique, des conférences partout dans l'hexagone et au delà, il donnait même des cours de stratégie organisationnelle dans une école de commerce prestigieuse. Plus connu que lui c'était difficile à trouver dans son milieu. Il était 'La Référence'. Si le prix Nobel de conseil existait, il l'aurait déjà obtenu.
Et justement il ne voulait pas descendre d'un cran, connaître les affres de la relégation en deuxième division, sur une bête erreur d'attention, sur un oubli. Combien d'entrepreneurs célèbres étaient retombés dans l'anonymat parce qu'ils avaient raté une révolution technologique, sous estimé un changement social.

Les choses étaient claires désormais. Il ne restait qu'à définir la stratégie la mieux adaptée pour atteindre son objectif. Je pris les choses en main et découpa la séquence de réflexion en étapes, comme le fait tout bon consultant en organisation:

  • Quel réseau social privilégier
  • Quelle communication adopter ?
  • Quels moyens utiliser ?
La première question fut une formalité; le réseau social le plus connu au monde, Facebook, , trop orienté  sur l'échange de photos de vacances et autres objets propres à la sphère personnelle, ne correspondait pas du tout à sa stratégie. Il fallait se focaliser sur les deux réseaux professionnels les plus célèbres en France, l'un plus américain, Linkedin, l'autre plus français, Viadeo. Les deux étant complémentaires, nous décidions de définir une approche par priorité, avec un réseau majeur et un réseau mineur. Dans son cas, Linkedin était plus global, plus professionnel, plus orienté entrepreneur et leader d'opinion (Barack Obama est sur Linkedin et pas sur Viadeo) ce qui correspondait vraiment au type de notoriété que recherchait mon ami.
La seconde question demandait de décliner les possibilités de Linkedin avec la capacité de mon ami à emporter l'adhésion d'une communauté, à exprimer des convictions puissantes et bien argumentées, en français comme en anglais. Il s'avère que si l'on veut se donner les moyens de la notoriété sur un réseau social puissant comme Linkedin, il vaut mieux se faire assister. Mon ami avait une attaché de presse capable d'écrire, il était lui même un excellent communicant, toutes les conditions étaient réunies pour réussir. Dans le cas de Linkedin, nous convenions de créer son profil et de l'enrichir d'une page entreprise; de plus mon ami ouvrirait un blog entreprise, avec un rédacteur en chef dédié, et un blog personnel, les deux étant attachés à son profil sur le réseau social. Il en ferait de même avec Twitter, puissant outil de notoriété quand il est utilisé conjointement avec Linkedin. Et tout ceci devait impérativement disposer d'un relais sur le site institutionnel de son entreprise. On était prêt. Il ne manquait plus que la question des moyens; combien cela pouvait lui coûter ?
A cette troisième et dernière question, il répondit: quand on aime on ne compte pas. Et sa notoriété il l'aimait. Il s'avérait alors nécessaire d'investir dans un 'Community Manager' et un chargé de relations publiques spécialisé dans les réseaux sociaux. Son entreprise ne s'en porterait que mieux s'il était encore plus connu, plus loin, plus fort, dans toute la galaxie.

Son visage rayonnait. Il se fixa des objectifs de nombre de contacts sur Linkedin, d'adeptes sur sa page entreprise, de publications sur les blogs et de tweets. Il rejoindrait rapidement Richard Branson et Bill Gates dans le gotha des influenceurs.


Thierry Biyoghé







2 commentaires:

  1. Et oui impossible de faire sans les réseaux sociaux aujourd'hui. On en a rêvé et Linkedin l'a fait. J'espère que ce billet va aider celles et ceux qui ne savent pas par quel bout prendre le sujet et qui pensent que c'est trop technique.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Encore une idée reçue qui se fait tordre le cou. Technique Linkedin ? Ce n'est pas avant tout une mise en application d'une réflexion (intense et profonde) de sa stratégie de communication ? A méditer...

      Supprimer